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Je connus la prime
amourette.
Auprès d'une sirène, une
femme-poisson,
Je recus de l'amour la
première leçon,
Avalai la première arête.
Déférence gardée envers
Paul Valéry,
Moi, l'humble troubadour,
sur lui je renchéris,
Le bon maître me le
pardonne,
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Et qu'au moins, si ses vers
valent mieux que les miens,
Mon cimetière soit plus
marin que le sien,
Et n'en déplaise aux
autochtones.
Cette tombe en sandwich,
entre le ciel et l'eau,
Ne donnera pas une ombre
triste au tableau,
Mais un charme indéfinissable.
Les baigneuses s'en
serviront de paravent
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Pour changer de tenue,
et les petits enfants
Diront : "Chouette
! un
château de sable !"
Est-ce trop demander...
!
Sur mon petit lopin,
Plantez, je vous prie,
une espèce de pin
Pin parasol, de préférence,
Qui saura prémunir contre
l'insolation
Les bons amis venus fair'
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sur ma concession
D'affectueuses révérences.
Tantôt venant d'Espagne et
tantôt d'Italie,
Tout chargés de parfums,
de musiques jolies,
Le mistral et la tramontane
Sur mon dernier sommeil
verseront les échos,
De villanelle un jour, un
jour de fandango,
De tarentelle, de sardane...
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Et quand, prenant ma butte
en guise d'oreiller,
Une ondine viendra
gentiment sommeiller
Avec moins que rien de
costume,
J'en demande pardon par
avance à Jésus,
Si l'ombre de ma croix s'y couche un peu dessus
Pour un petit bonheur
posthume.
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Pauvres rois, pharaons
!
Pauvre Napoléon !
Pauvres grands disparus
gisant au Panthéon !
Pauvres cendres de
conséquence !
Vous envierez un peu
l'éternel estivant,
Qui fait du pédalo sur la
vague en rêvant,
Qui passe sa mort en
vacances...
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Vous envierez un peu
l'éternel estivant,
Qui fait du pédalo sur la
vague en rêvant,
Qui passe sa mort en
vacances...
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Supplique pour être enterré
à la plage de Sète
La camarde, qui ne m'a
jamais pardonné
D'avoir semé des fleurs
dans les trous de son nez,
Me poursuit d'un zèle
imbécile.
Alors, cerné de près par
les enterrements,
J'ai cru bon de remettre
à jour mon testament,
De me payer un codicille.
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Trempe, dans l'encre bleue
du golfe du Lion,
Trempe, trempe ta plume,
ô mon vieux tabellion,
Et, de ta plus belle écriture,
Note ce qu'il faudrait qu'il
advînt de mon corps,
Lorsque mon âme et lui ne
seront plus d'accord
Que sur un seul point :
la rupture.
Quand mon âme aura pris
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son vol à l'horizon
Vers celles de Gavroche
et de Mimi Pinson,
Celles des titis, des
grisettes,
Que vers le sol natal mon corps soit ramené
Dans un sleeping du
"Paris-Méditerranée",
Terminus en gare de Sète.
Mon caveau de famille,
hélas ! n'est pas tout neuf.
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Vulgairement parlant, il
est plein comme un oeuf,
Et, d'ici que quelqu'un
n'en sorte,
Il risque de se faire tard
et je ne peux
Dire à ces braves gens
"Poussez-vous donc un peu !"
Place aux jeunes en
quelque sorte.
Juste au bord de la mer,
à deux pas des flots bleus,
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Creusez, si c'est possible,
un petit trou moelleux,
Une bonne petite niche,
Auprès de mes amis
d'enfance, les dauphins,
Le long de cette grève où le sable est si fin,
Sur la plage de la Corniche.
C'est une plage où, même
à ses moments furieux,
Neptune ne se prend jamais trop au serieux,
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Où, quand un bateau fait
naufrage,
Le capitaine crie : "Je suis
le maître à bord !
Sauve qui peut ! Le vin et
le pastis d'abord !
Chacun sa bonbonne et
courage !"
Et c'est là que, jadis, à
quinze ans révolus,
A l'âge où s'amuser tout
seul ne suffit plus,
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